mardi 21 octobre 2014

Première ouverture de skyline.

Alors c’est très simple, on est monté avec du matos, on a grimpé, on a posé notre slack et notre pendulaire, on en a bien profité, et on est redescendu.
C’était, à peu de chose près, ce qu’on avait prévu, mais ça n’est jamais aussi simple.

Départ mercredi soir de Chambéry avec Florentin en direction de Courmayeur, dans le but de monter le jeudi matin dans la Combe Maudite pour avancer au maximum l’installation en attendant les copains, qui, eux, travaillent et n’arriveront que le samedi matin.
Sauf que jeudi c’est pluie ! On reste la journée dans le camion à attendre que ça passe pour monter, mais ça ne passe pas.
L’éclaircie se fera attendre jusqu’à vendredi en milieu de matinée. Le temps de décharger les 60kg (chacun) de matériel et on est dans la benne, avec sac de hissage et pulka bien pleins.
Arrivé en haut nous constatons sans surprise qu’il n’y a plus de trace sur le glacier, effacée par les chutes de neige de la veille. C’est donc sac sur le dos et pulka harnachée à la taille que nous attaquons la traversée du Glacier du Géant de la pointe Helbronner jusqu'au pied de la Tour Ronde.
Faire la trace n’est pas facile, surtout quand on ne connait pas le coin et que le brouillard s’invite régulièrement, nous obligeant à nous arrêter jusqu'à l’éclaircie suivante.


(Le brouillard se lève, nous approchons bientôt du bivouac.)

Arrivés à la gare du téléphérique aux alentours de 11h30, nous n’arriverons à l’emplacement de bivouac qu’à 17h, alors que cet itinéraire ne demande normalement qu’une à deux heures de marche. Les pulkas, le brouillard et la trace à faire nous on fait perdre beaucoup de temps.
Une fois arrivés, nous dégageons un espace plat et abrité du vent pour y poser la tente, avalons rapidement un lyophilisé chacun, puis nous réfugions sous la tente alors que le froid tombe avec la nuit.

Le lendemain au réveil nous découvrons ce qui sera notre routine pour les nuits à venir : tente givrée qui trempe les duvets, chaussures gelées, eau gelée, etc… C’est donc toute une routine de préparation matinale qui doit se mettre en place : préparer un thermos la veille au soir, préparer stratégiquement ses affaires pour sortir du duvet…


(Fait frisquet le matin..)

Une fois sortis nous décidons d’attaquer la voie Lepiney sur le Trident du Tacul en attendant les copains qui, normalement, ne devraient pas tarder.
Arrivée au relais de départ nous attaquons la voie par une vire sur la gauche, semblant correspondre aux indications du topo, mais, Florentin en tête, nous nous rendons vite compte que l’escalade est beaucoup plus dure que prévu, et que ça ne passera pas en grosse chaussures de montagne. Florentin redescend au relais et c’est moi qui m’y colle pour finir la longueur et récupérer les coinceurs laissés dans la voie. Après une belle frayeur j’arrive au relais, laisse passer une cordée qui nous dépasse (mais qui fera elle aussi demi-tour quelques dizaine de mètres plus loin),  puis descend en rappel. Il est 14h quand nous revenons à la tente un peu dépités, mais surtout surpris par le niveau de la voie, annoncée 5c max (TD).


(Dans ce que nous pensions être la voie Lepiney.)

Au bivouac les copains sont arrivés et me motivent à repartir avec eux finir l’ascension des deux faces pour y poser les cordes fixes qui permettront l’installation du pendulaire et de la highline. Florentin reste au bivouac et nous repartons, Yoann, Yann, Ana et moi.
Arrivée à la rimaye il est 16h, et j’ai quelques doutes sur les chances de finir de poser les cordes fixes ce soir. Mais les amis alpinistes sont aussi très optimistes, et nous partons chacun dans nos voies : Yann et Ana dans la Bonatti-Tabou à la Chandelle du Tacul (6b+ max, ED-), Yoann et moi repartons dans la Lepiney, mais dans le bon itinéraire cette fois.
A mesure que le soleil passe derrière le Mont Blanc, la température descend et la grimpe se rafraîchit. Et les nombreuses vires enneigées présentes sur l’itinéraire ne nous aident pas. En chausson dans la neige, sur du rocher mouillé, à l’ombre, à 3500m, à l’automne, un vrai régal pour les doigts et les pieds !


(Grimpe automnale à la tombée du jour.)

Nous trouvons finalement l’endroit idéal pour poser nos installations et commençons à équiper. Le perfo de notre côté tombe en rade après avoir posé 3 points de 10 pour le pendulaire. Décision est donc prise que nous poserons le pendulaire sur la highline, ce qui nous évitera d’avoir à équiper deux installations différentes.
Nous redescendons ensuite en déroulant les cordes d’accès, puis nous rentrons au camp, il est 21h.


(Le bivouac.)

Le lendemain, dimanche, la moitié de l’équipe repart au refuge Torino pour participer à une manifestation organisée par l’association Moutain Wilderness contre la pollution sonore en montagne.
Nous ne sommes donc plus que 4 pour finir l’installation. Nous partons de bonne heure Boris, Manu, Louis et moi pour hisser le matériel jusqu'aux ancrages et finaliser l’installation.
Tout se passe bien et à 14h la ligne et le pendulaire sont en place. Nous redescendons manger un bout, puis nous remontons Louis, Florentin et moi, pour tester la slack. Entre temps, pendant que nous remontions, Boris et Manu décollent depuis le glacier en parapente, destination Chamonix et une bonne bière en terrasse que nous leur envions un peu.
Viens le moment tant attendu, les premiers pas sur cette sangle de 65m de long à 3500m d’altitude. Et là c’est la rouste.

(Départ timide sur la highline.)

Nous avons peu tendu la sangle pour que le pendule ne soit pas trop sec, et il y a sous la sangle une corde de sécurité, plus une corde de réglage, ce qui alourdit considérablement la ligne, sans parler des cordes de sauts qui pendent depuis le milieu de la ligne et casse les rythme des oscillations de la sangle. Bref, on est terreur dessus !
J’arrive quand même à aligner quelque pas timide, Louis arrive à se lever, puis pose quelques petits tricks, et Florentin nous fera même le plaisir de monter sur la ligne, lui qui n’a jamais approché une highline !
Cette ligne est vraiment magnifique, avec vue sur le Mont Blanc et une belle ouverture sur le côté avec panorama sur le glacier et sur l’arête de la Brenva.
 Après une journée d’installation au soleil en altitude, on commence à être bien fatigué et la nuit approchant, nous décidons de rentrer.
Nous retrouvons l’autre moitié de l’équipe aux tentes, enfin revenus de leur manifestation.
On discute un peu des possibilités de départ pour le pendulaire, de nos impressions sur la highline, des conditions de vol en parapente que les copains ont rencontré lors de leur manifestation, etc…

Lundi matin c’est la course, nous nous dépêchons pour avoir le temps de slacker un peu, de sauter, et de démonter avant de rentrer pour 16h30 au refuge et attraper la dernière benne.
En guise de sauts nous aurons plutôt une grande balançoire loin au-dessus du glacier, avec vue sur le Mont Blanc, tout en douceur et en contemplation. Mais l’exit de saut est repéré et nous reviendrons pour sauter comme il se doit une prochaine fois !

(Yoann survole le paysage.)

Quelques essais pas forcément plus concluant que la veille pour Louis et moi, puis c’est la désinstallation.
Après une longueur de désescalade exposée, assurée par Louis en contrebas avec une corde statique, nous retrouvons les relais chaînés et entamons la dernière descente.
Arrivé au bivouac que nous avons plié le matin, il est 14h30. Il nous reste 2h pour remonter une pulka et nos sac, Louis Yoann Yann et moi, Florentin et Ana étant partis en avance avec la seconde pulka. Timing très serré, nous avançons vite, mais arrivés au ressaut raide nous commençons à en baver sérieusement : 50kg à traîner dans une neige transformée ce n’est pas évident. Je suis harnaché à la pulka, Yoann devant moi m’accroche un bout de corde au baudrier pour me tirer et Yann derrière pousse la pulka. Au bout de quelques centaines de mètres je « coule une bielle ».  Je laisse ma place à Yann et prends la sienne derrière la pulka.
Après une très longue heure de galère et grâce à l’aide de 3 autres alpinistes rencontrés dans la montée, nous arrivons au refuge à 16h18, a peu près dans les temps. Sauf qu’il nous reste les 228 marches qui mènent du refuge à la télécabine à descendre avec tous le matériel. C’est la course, nous sommes tous épuisés et les allers-retours dans les escaliers n’arrangent rien !
Finalement ca passe de justesse, nous descendons avec la dernière benne de service, et c’est le retour à la vie « normale », à la chaleur et à l’air un peu moins raréfié.

La journée s’achevera sur un tri de la tonne de matos sur un parking en plein milieu du passage, sous le regards parfois bien étonnés des voisins.

Merci les copains pour ces moments là haut !